Stress chez l'humain

Le stress qualifie à la fois une situation contraignante et les processus physiologiques mis en place par l'organisme pour s'y adapter.


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Le stress qualifie à la fois une situation contraignante et les processus physiologiques mis en place par l'organisme pour s'y adapter. À court terme, le stress n'est pas obligatoirement mauvais, sinon indispensable, mais ses effets à long terme peuvent génèrer de graves problèmes de santé. Chez l'homme adulte, le stress peut avoir des origines physiques, chimiques ou psychiques. Dans la société actuelle, les causes psychiques sont les plus habituelles, surtout en milieu professionnel. Le stress fait partie des troubles psychosociaux.

Vers une définition

Au sens strict du terme la définition du stress ne comprend pas la réponse de l'organisme aux contraintes mais seulement les contraintes elles-même, par contre le terme "syndrome général d'adaptation" est approprié pour parler des réponses aux contraintes.

Biologiquement parlant le stress est une réponse de cet organisme pour maintenir l'équilibre biologique dans un état fonctionnel.

En psychologie, la notion de stress regroupe plusieurs notions :

L'étude du stress fait intervenir la médecine, la psychologie et la sociologie.

Ambiguïté du concept de stress, préambule à une définition

Chacun de nous à l'heure actuelle a pu utiliser le mot «stress» pour définir ce qu'il ressentait à un moment ou un autre de son existence ainsi qu'à l'heure actuelle, il est particulièrement à la mode d'appliquer ce terme à toutes sortes de situations de la vie tout autant publiques que privées.

Mais l'homme «de la rue» ne donne pas vraiment de définition précise du stress étant donné qu'il n'en a pas besoin dans la mesure où il le ressent déjà corporellement. Ainsi le stress, à un niveau de compréhension assez restreint, est déjà compris intuitivement par chacun de nous. Malheureusement, cette évidence du ressenti sert d'alibi à une définition peu développée et non consensuelle.

La définition du stress est fréquemment liée au concept de performance. Cependant, le lien entre ces deux notions n'est pas si évident et ne trouve pas de consensus. En effet, pour certains individus, le stress est vital à leur performance, il décuple leurs chances de mener à bien ce qu'ils ont entrepris. C'est dans cette optique qu'on peut entendre certains dire que le stress — ou plutôt dans leur terme le «défi », la «motivation» — est la condition sine qua non de leur réussite socioprofessionnelle. Pour d'autres individus, le stress inhibe leurs capacités et les empêche de mener à bien ce qu'ils ont entrepris. Dans cette optique là, une quantité de thérapies antistress ont vu le jour sur le marché des services de bien-être. Ici, le stress est l'ennemi qu'il faut combattre à tout prix pour pouvoir accéder à une vie meilleure sous tous rapports.

On constate par conséquent que la relation stress-performance, quoique toujours évoquée quand on parle de stress, n'est pas sujette à un consensus et pourrait provenir d'une définition du stress trop peu fouillée à la base ou encore d'une relation complexe mais intéressante à étudier entre le stress et la performance. D'un point de vue scientifique, le problème du consensus est aussi présent et le concept de stress reste dans le vague, le global.

Une première source d'imprécision réside dans le fait que le terme stress «est déjà tout un programme dans la mesure où il sert à désigner à la fois l'agent responsable, la réaction à cet agent et l'état dans lequel se trouve celui qui réagit» (Dantzer, 2002).

Une seconde source d'imprécision réside dans le fait qu'la plupart de disciplines se sont intéressées au stress et qu'elles ont toutes insisté sur les aspects leur tenant à cœur et en laissant tomber les autres. Ce qu'il faut comprendre cependant, c'est que le stress, outre le fait qu'il soit tout à la fois la situation, l'état et la réaction, doit être expliqué selon un biais bio-psycho-social et relationniste dans la mesure où il est constitué d'une foule de facteurs, mécanismes ou encore réponses, tous bio-psycho-sociaux dont l'interaction demeure extrêmement complexe.

Le concept de stress

Le stress a fréquemment une connotation négative parce que les gens l'associent à la peur ou la colère, qui sont des émotions qui nous perturbent. Cependant, une grande joie, un grand succès peuvent aussi provoquer des réactions physiologiques (tension musculaire, fatigue, etc. ). Il y a deux types de stress : le stress aidant, bénéfique pour notre organisme («eustress») et le stress nuisible, gênant («dystress»). Si le niveau de tension est adapté à la situation, à l'action, il est bénéfique. Si au contraire, il n'est pas adapté, disproportionné, il y aura toujours plus de tensions et par conséquent, des conséquences physiologiques et psychologiques. On peut par conséquent affirmer que le stress, c'est la totalité des réactions de l'organisme (positives ou négatives) à une demande d'adaptation.

Il faut savoir que le stress existe depuis très longtemps déjà. Les humains ont toujours dû faire face à des situations déstabilisantes et qui provoquent un déséquilibre. Actuellement, nous connaissons ces nombreuses situations. Ce sont par exemple, nos inquiétudes concernant notre avenir économique, la vieillesse, la santé, le décès d'une personne proche, etc. La majorité du temps, nous nous contentons d'essayer de résoudre le problème sans essayer de savoir d'où il vient.

L'homme va par conséquent percevoir les demandes de son environnement, les traiter, et tenter de réagir à ces dernières par le biais d'une gamme de comportements innés et acquis qui forme un «potentiel personnel» de réponse, potentiel pouvant différer largement d'une personne à l'autre. La majorité des chercheurs s'intéressant au stress s'accordent à dire que le stress a un rôle à jouer dans ce potentiel personnel de réponse. Cependant, c'est au niveau de la nature de ce rôle que les scientifiques n'ont pas trouvé d'accords.

Le stress pouvait avoir comme cause une excitation émotionnelle. Ainsi la non-spécificité serait due à des stimuli présentant un point commun qu'est l'émotion. Nous verrons ensuite que cette non-spécificité peut en effet être remise en doute, de même que le lien unique entre le stress et l'émotion.

Clinique

Le stress est l'élément qui provoque un ensemble de réactions physiologiques (sueurs, accélération du cœur et de la respiration) et psychologiques (inquiétude, troubles du sommeil) qui se manifestent quand une personne est soumise à un changement de situation.

Plus simplement, le stress c'est une sensation qu'on éprouve quand on est confronté à une situation à laquelle on ne croit pas pouvoir faire face correctement. Il provoque un sentiment de malaise. C'est comme un réflexe de l'organisme qui agit contre les agressions extérieures. Cela va déclencher un ensemble de réactions nerveuses et hormonales.

Le stress peut permettre une mobilisation des forces physiques et mentales. A titre d'exemple, l'élévation du rythme cardiaque et respiratoire (dû surtout à une décharge d'adrénaline) sert à mieux oxygéner les muscles ; c'est une réaction animale (préparation à la fuite ou au combat face à un danger). Mais il peut aussi faire perdre les moyens et nuire à l'action ; il s'agit certainement d'une autre réaction animale (camouflage impliquant l'immobilité).

Mais cette situation épuise l'organisme. Une situation prolongée de stress entraîne une fatigue et facilite la naissance de maladies, surtout cardio-vasculaires ; le stress au travail est une des premières cause d'arrêt-maladie (surmenage, on parle quelquefois de burnout ou syndrome d'épuisement professionnel pour désigner une usure extrême au travail).

Les causes du stress

On a l'habitude d'associer le stress à des situations créées par des relations humaines (passage d'un examen, conflit interpersonnel... ) mais ce syndrome se manifeste pour tout changement : voyage (choc culturel, décalage horaire), changement climatique (par exemple quand on sort dans le froid), événement professionnel (licenciement, nouveau travail, changement d'équipe, changement d'école), événement familial ou sentimental (déménagement, mariage, divorce, naissance, décès, nouvelle fait la connaissance de , dispute), changement corporel (adolescence, ménopause)...

La non spécificité du stress

En 2005, une étude reprenant plus de 2000 articles médicaux reconnaît l'importance du stress chronique dans la genèse de multiples affections. [réf.  nécessaire]

Un concept de laboratoire

La peur génère la réaction émotive de l'amygdale, assez sommaire, qui se limiterait aux options de fuite ou de combat. L'inhibition de l'action peut être le facteur déclenchant de désordres neuro-psycho-immulogiques prolongés conduisant à des pathologies multiples, qui pour le moment n'ont aucune spécificité.

Mais le dogme fuite/combat comme solution à la confrontation en cas de peur est-il juste ? La trilogie anglosaxone fright/flight/fight qu'on pourrait transcrire en français par frayeur/fuite/affrontement serait l'unique réaction biologique de l'animal en situation de stress ou devant un stimulus menaçant. Comme son nom semble l'y prédestiner, Laborit fut avant tout un génie de Laboratoire. Son expérimentation se réalise avec des rats d'élevage enfermés dans des cages, ce qui est loin de la condition de l'animal sauvage dans la nature. Si pour la santé/survie d'un animal en cage (ou d'un homme) il est permis de faire l'éloge de la fuite (physique ou spirituelle), tout observateur de la vie animale sauvage libre sait que le scénario naturel est tout autre. La réaction habituelle de la plupart d'espèces animales est l'immobilisation ou le mimétisme dissimulateur, fréquemment favorisé par la peur qui décolore les téguments. Le malaise vagal humain, toujours si habituel à notre époque, déclenché par la vue du sang ou une sensation aiguë de douleur, semble un réflexe sympathique vestigial de la protection qu'offrait cette immobilité et cette pâleur lors de l'attaque de prédateurs, compagnons habituels de l'homme primitif !

Irréversibilité des événements stressants

Si la peur est la source principale de l'inhibition de l'action et de la mise en mots, l'éloge de la fuite comme solution, proposée par Laborit, reste du domaine de l'utopie car selon la théorie de "la palette émotionnelle", la peur n'est qu'un signal d'avoir à s'adapter que ce soit par la fuite, le combat ou le camouflage, l'important est l'correction de l'action avec la survie personnelle.

Et puis, l'homme peut-il toujours modifier le cours des évènements par son action ? Il existe des situations dans lesquelles aucune action physique n'est envisageable, des modifications de son environnement auxquelles l'homme ne parvient pas à s'adapter, non pas parce qu'il est inhibé, mais parce qu'il existe une impossibilité réelle d'action : soit l'être humain n'a jamais vécu ni connu une telle situation à laquelle il n'a pas appris à faire face ou à répondre, soit il existe une irréversibilité de certaines situations qu'aucune action humaine ne pourra modifier ou faire revenir à un état antérieur. Par exemple dans un autre registre émotionnel (lié à la tristesse), il est évident que la mort est un évènement irréversible et que nous n'avons personnellement aucune possibilité de faire ressusciter l'un de nos proches qui vient de mourir. La mort d'un être cher ou sa séparation font partie de la liste des situations énumérées par Jacques Salomé dans sa recherche du sens de nos maux.

Bien d'autres événements de la vie ont ce caractère d'irréversibilité mais ils sont moins dramatiques : un divorce, un déménagement, un licenciement, le départ d'un enfant de la maison… possèdent fréquemment cette irréversibilité pour laquelle l'homme ne peut que subir. Ces événements de vie ont fait l'objet d'une évaluation scientifique reconnue par le monde médical, dans une échelle cotée, dès 1967, par une équipe américaine, effectuée sur un large échantillon de militaires, montrant un risque de maladies qui augmente à partir d'un certain score atteint par l'individu.

Échelle des facteurs du stress

(d'après Holmes et Rahe, 1967) [1]

La majorité de ces événements de vie, en particulier ceux localisés en haut de l'échelle, les plus puissants, correspond à des situations nouvelles auxquelles l'homme doit s'adapter. Or, cette obligation d'adaptation aux modifications de l'environnement est corrélée à la notion de stress. L'inconvénient majeur du concept de stress est sa non-spécificité, car le type de l'agent stressant n'a toujours jamais pu être relié à un type spécifique de maladie, ni même à son déclenchement qui reste particulièrement variable d'un individu à un autre. D'autres facteurs doivent être pris en considération avec, d'un côté les qualités psychologiques et biologiques de résistance au stress de l'individu et , de l'autre les caractéristiques de la situation stressante : intensité, dimension, durée, soudaineté, imprévisibilité, nouveauté… Il est évident que la mort anticipée d'un proche, alité depuis plusieurs mois à cause d'une grave maladie, n'engendre pas le même stress qu'une mort subite sans signes annonciateurs. Il est aussi manifeste qu'un deuil vécu dans un entourage familial affectif, avec un rituel social respecté, risque d'être moins stressant que le deuil d'un proche qui s'est suicidé sans laisser de raisons à son acte. La médecine aura beau progresser, elle sera toujours incapable de mesurer réellement l'intensité et la qualité d'un événement stressant dont le ressenti est toujours subjectif. À noter que dans l'échelle de stress de Rahe, le mariage suit de près le divorce en intensité de stress. Cela s'explique par le fait que le stress est un stimulus de désadaptation, comme pouvait l'être un mariage dans les années 1960, car les époux quittaient leur famille, leurs amis avec à la clé un déménagement lointain selon les mutations de l'Armée (à l'époque et dans ce milieu plutôt conservateur, le mariage à l'essai ou la cohabitation prénuptiale n'étaient pas à la mode !).

Un stress vital

L'être humain a été pourvu au cours d'une évolution portant sur quelques millions d'années de mécanismes neurobiologiques lui servant à s'adapter à l'ensemble des modifications de son environnement, qu'elles soient physiques, sociales et/ou psychiques. Comme l'a démontré Claude Bernard, l'organisme vivant doit maintenir son équilibre interne (homéostasie) en mobilisant l'énergie utile aux processus d'adaptation. Cette adaptation est indispensable lors des variations de l'environnement, surtout vis-à-vis des stimuli d'agression physiologique et psychologique. C'est cette réponse aux stimuli qu'on appelle désormais stress. L'homme vit en état permanent de stress, stimulation indispensable aux rythmes biologiques.

Mais si un certain niveau de stress est indispensable à la vie, le dépassement d'un certain seuil peut devenir dangereux ou alors fatal, s'il outrepasse les capacités d'adaptation de l'organisme, d'où la naissance de maladies qui peuvent être rapidement mortelles. Cette relation stress/maladie apporte bien une nouvelle dimension à l'approche médicale classique. Les travaux de Hans Selye Physiologie et pathologie de l'exposition au stress ont fait de ce concept le nouveau «malaise dans la civilisation» et ont suscité maintes recherches en particulier dans les pays anglo-saxons.

Actuellement le stress est l'unique concept médical, admis par la communauté scientifique, qui fait un pont entre le psychisme et les maladies somatiques via les réactions neuro-hormonales. Cette réaction démontre la participation du cerveau dans la genèse des maux du corps. Le Professeur J. L. Dupond, Chef du Service de Médecine Interne du CHU de Besançon, fait partie des pionniers français qui a mis en exergue le rôle du stress. Dès 1987, il écrivait que «la médecine moderne a rassemblé en quelques années suffisamment d'arguments cliniques, biochimiques, neurophysiologiques et immunologiques pour accorder à l'immunopsychopathologie le droit de naître…» Le Professeur Dupond, s'appuyant sur de multiples travaux internationaux, attirait l'attention du monde médical, jusqu'alors sourd, sur l'action du stress. Il montrait son influence sur l'équilibre immunitaire, avec son intervention dans certains processus d'immuno-suppression, expliquant la survenue de diverses infections, dans les allergies ou dans certaines maladies auto-immunes (maladies de dispositif), ou alors dans les cancers. L'adaptation de l'organisme à l'environnement extérieur est en effet sous le contrôle de trois dispositifs d'intégration qui assurent l'homéostasie interne : ce sont les dispositifs nerveux, endocrinien et immunitaire. Le premier permet la transmission de signaux de type électrique modulés grâce à des neuromédiateurs ; le second utilise des messagers moléculaires ou " hormones " qui circulent et transmettent une information spécifique à distance ; le troisième transmet des messages grâce à des cellules qui circulent dans l'organisme et produisent localement des molécules actives, les "cytokines " et les anticorps.

Approche biologique du stress : historique et approche actuelle

Pour tout autant qu'on se souvienne, le mot stress vient du latin stringere qui veut dire «rendre raide», «serrer», «presser». Cette racine latine est reprise par la langue anglaise et en 1303 déjà, Robert Mannyng dans son ouvrage Handlyng Synne parle du stress.

Au XVIIe siècle, la notion de stress veut dire «état de détresse» et renvoie à l'idée d'oppression, de dureté de vie, de privation, de fatigue, d'adversité, de peine ou encore d'affliction.

Dès le XVIIIe siècle, le stress prend une connotation contemporaine en renvoyant à une force, pression, contrainte, influence, un grand effort de la matière, des organes et même du psychisme.

Le médecin physiologiste français Claude Bernard fut un des premiers à donner une interprétation des effets du stress sur notre comportement, en 1868. Selon lui, les réactions dues au stress visent à maintenir l'équilibre de notre organisme. Puis, Walter Cannon, un neurophysiologiste américain, nomma cette recherche «homéostasie» (qui veut dire : «tendance des corps vivants à stabiliser leur organisme»).

Le mot «stress» est apparu autour de 1940. Au départ, c'était un mot anglais (qui a changé de signification ensuite) employé en mécanique ou en physique, qui voulait dire «force, poids, tension, charge ou effort». Ce n'est qu'en 1963 que Hans Selye utilise ce mot en médecine, et qu'il le définit comme étant «des tensions faibles ou fortes, éprouvées depuis toujours, et déclenchées par des événements futurs désagréables ou agréables». Il y voit des «forces potentiellement destructrices» et parle «d'état de stress» pour décrire les «changements physiques génèrés par une situation stressante». C'est la notion moderne du stress que nous employons fréquemment actuellement.

La science va prendre progressivement ses droits sur la notion et on constate que le stress est dans un premier temps utilisé en physique métallurgique avec la loi de Hooke qui stipule qu'une force extérieure (load) agissant sur un corps, provoque une tension de ce corps (stress) qui peut se transformer en déformation (strain) (Jürgen Nitsch, 1981, p.  43-38. In Maurer Milka, 1983).

La contrainte excessive exercée sur un matériau qui devient par conséquent fatigué, déformé, cassé, rend toute tentative de retourner à l'état d'origine vaine, puisque le matériau est bien plus vulnérable qu'il ne l'était jusque là, comme un trombone qu'on aurait déplié et qu'il s'agirait de remettre en place. On voit par conséquent qu'avec cette utilisation du mot stress, il y a déjà un lien créé avec une certaine forme d'adaptation où l'excès de stress rendrait le matériau plus vulnérable.

À partir de cette utilisation de la notion en métallurgie, une ressemblance se crée pour le vivant. Il survient alors l'idée que les situations excessivement agressives (load) provoquent un stress important pouvant entraîner des maladies physiques ou mentales (strain). C'est dans cette optique que William Osler (18491919), cardiologue, montre qu'un travail pénible et de lourdes responsabilités amènent aux tourments ainsi qu'à l'anxiété dont la persistance peuvent entraîner des problèmes médicaux.

Dès le XXe siècle, l'usage de la notion de stress aux organismes vivants va se généraliser, ceci sur la base de notions telles que l'homéostasie, concept créé à partir de la théorie cellulaire, et l'adaptation Darwinienne. Ce lien stress-homéostasie-adaptation va faire son chemin jusqu'à nos jours et produira une littérature abondante et féconde.

Le liage de ces trois notions forme l'approche dite biologique du stress et va permettre d'expliquer à sa façon la fonction du stress qui est l'adaptation à l'environnement, ceci dans certaines limites, et par conséquent qui sert au maintien de la vie.

Comme on vient de le dire, le modèle biologique attache énormément d'importance à l'adaptation darwinienne. En réalité, c'est le noyau dur de cette pensée. Pour résumer la théorie de Darwin, on dira que l'adaptation correspond à la totalité des corrélations internes et externes qui font qu'un organisme peut vivre d'une certaine manière dans un habitat donné, et y contribuer à la perpétuation de l'espèce à laquelle il appartient. Cette adaptation se fait en faveur de la sélection naturelle qui prend la forme de problèmes qui sont posés à l'organisme qui, s'il n'arrive pas à les dépasser, le feront mourir. C'est ainsi qu'on peut résumer la sélection naturelle.

Maints auteurs ont pu montrer que s'adapter ou être adapté à un problème peut se faire de plusieurs manières. Et pour la théorie biologique du stress, ce dernier fait partie de l'effort adaptatif en préparant les organismes vivants à des réponses musculaires rapides et intenses augmentant par là même la capacité de fuir ou de lutter et par conséquent de survivre.

Nous verrons ensuite les apports et les limites d'une telle explication, mais jusque là, nous devons retracer quelque peu le décor dans lequel cette théorie a pris place.

Homéostasie et adaptation

Hippocrate en reprenant la théorie pythagoricienne des humeurs prétend que toute «dyscrasie» ou rupture de l'équilibre normal est la cause de maladie. Hippocrate pose ainsi les bases du concept d'homéostasie et des conséquences de son dépassement.

Scientifiquement parlant, c'est en 1865 que Claude Bernard observe et décrit le concept d'homéostasie, sans cependant le nommer comme tel :

Tous les mécanismes vitaux quelque variés qu'ils soient, n'ont toujours qu'un seul but, celui de maintenir l'unité des conditions de la vie dans le milieu intérieur.

Il y aurait par conséquent une propriété principale chez les êtres vivants qui serait la faculté de maintenir la stabilité du milieu interne. Cette constance du milieu intérieur est la condition «d'une vie libre et indépendante» face à un environnement toujours changeant, soulignant ainsi la fonction essentielle de l'homéostasie. L'homéostasie permet par exemple dans une certaine mesure à un homéotherme d'être indépendant de la température externe, chose qu'un poïkilotherme ne peut se permettre dans la mesure où il ne dispose pas de la thermogenèse et des processus thermolytiques pour réguler sa température interne. Par cet exemple, on comprend que l'homéostasie est obtenue non pas par un équilibre statique, mais plutôt mobile disposant de techniques de régulation pouvant gérer l'excès ou l'insuffisance.

Mais l'homéostasie ne s'arrête de loin pas qu'aux processus thermodynamiques, mais pour reprendre Claude Bernard, à «tous les mécanismes vitaux»[2]. Il existe par conséquent aussi une homéostasie chimique, alimentaire, etc. On peut ainsi citer entre autres le rôle prépondérant du système hypophysaire dont le stress entre autres dépend, ou d'une façon plus générale du dispositif hormonal et ses multiples fonctions dans le maintien d'une homéostasie «globale». Dès 1878, Claude Bernard montre que quand la stabilité du milieu intérieur est perturbée, il y a une vulnérabilité à la maladie. Claude Bernard se situe par conséquent dans la vision hippocratique de la maladie, comme quoi le germe maladif n'est pas l'unique facteur, mais qu'un dérangement de l'équilibre normal conduit à une fragilisation.

C'est Walter Bradford Cannon (1871-1945), physiologiste américain, qui crée le nom d'homéostasie à partir du grec (stasis : état, position et homoios : égal, comparable à ) et il y inclura en outre la notion de stress. À partir de l'observation sur des animaux des vagues de l'estomac et de l'intestin au cours de la digestion et leurs modifications, ou alors disparition en cas de frayeur ou crainte, Cannon va s'intéresser aux réactions émotionnelles fortes et leurs relations au corps.

En parallèle aux modifications de la digestion, Cannon observe d'autres dérèglements comme l'accélération du rythme cardiaque, l'augmentation de la sécrétion gastrique.

Dès 1915, dans Bodily Changes in Pain, Hunger, Fear and Rage, Cannon décrit sa théorie de l'homéostasie sans s'écarter pour tout autant du concept expliqué par Claude Bernard :

Les êtres vivants supérieurs forment un dispositif ouvert présentant de nombreuses relations avec l'environnement. Les modifications de l'environnement déclenchent des réactions dans le dispositif ou l'affectent directement, aboutissant à des perturbations internes du dispositif. De telles perturbations sont normalement maintenues dans des limites étroites parce que des ajustements automatiques, à l'intérieur du dispositif, entrent en action et que de cette façon sont évitées des oscillations amples, les conditions internes étant maintenues environ constantes […]. Les réactions physiologiques coordonnées qui maintiennent la majorité des équilibres dynamiques du corps sont si complexes et si spécifiques aux organismes vivants qu'il a été suggéré qu'une désignation spécifique soit employée pour ces réactions : celle d'homéostasie.
(The Wisdom of the Body, 1932).

Cannon va chercher la cause de cette homéostasie et il prouve par une série d'expériences sur l'animal que quand l'organisme est soumis à une violente émotion comme la peur ou la fureur, la production d'adrénaline augmente (The Wisdom of the Body) . Enfin, dans Stresses and Strain of Homeostasis, article publié en 1935, Cannon décrit comment la médullosurrénale, productrice de l'adrénaline, sert à faire face aux changements de température, aux besoins énergétiques ou encore aux variations de pression partielle de l'oxygène dans l'air.

Comme on peut le voir, Cannon associe les processus homéostatiques de maintien de la vie au phénomène du stress, ceci sur leur base d'une production d'adrénaline par la médullosurrénale.

Il convient alors de se demander, dans l'optique de ce travail, la raison du stress selon Cannon. Pour ce dernier, l'homéostasie est mise en danger si les substances principales manquent ou sont en excès (origines endogènes) ou encore si un facteur externe est délétère (facteurs exogènes) pour l'organisme. Cannon conçoit par conséquent l'homéostasie comme ayant certaines limites dont la transgression provoque un stress, défini par Cannon comme un stimulus endogène ou exogène provenant du déséquilibre trop important de l'homéostasie. Chez Cannon, le stress se situe par conséquent d'une certaine manière dans le pathogène car il est la conséquence de processus homéostatiques sollicités jusqu'aux limites de leurs marges d'adaptation fonctionnelle. Ainsi, à long terme, l'organisme est fragilisé, vulnérabilisé (position de Bernard et Hippocrate), et ne pourra reprendre sa capacité homéostatique d'origine. Pour prouver ce fait, Cannon citera les maladies carentielles qui une fois commencées rendent l'organisme plus faible à long terme, ceci même après une guérison.

Au niveau adaptatif à court terme cependant, le stress va conduire aux réactions de fuite ou de lutte qui sont la conséquence d'un hyperfonctionnement sympathique. Le stress a par conséquent un rôle adaptatif essentiel à jouer car, «tout comme un matériau ne peut résister qu'à des contraintes modérées, l'homéostasie ne peut être maintenue que si les écarts à la normale restent assez faibles. Au-delà, des processus correctifs servant à faire face sont nécessaires : c'est le stress». (Dantzer, 2002). Le stress pour Cannon est par conséquent le complément à l'homéostasie qui sert à diminuer au maximum les dégâts déjà génèrés à l'organisme. C'est une réaction d'urgence à court terme qui facilite la fuite ou la lutte, c'est-à-dire l'évitement de la situation pathogène. Et en ce sens, le stress est essentiel à l'adaptation d'un organisme.

Le Syndrome Général d'Adaptation ; la réaction physiologique face à la menace

Syndrome Général d'Adaptation

Selon Eric (1994) ou encore Henri Laborit, les réponses comportementales innées préservant l'intégrité de l'organisme face à la menace sont la fuite et l'attaque. Ce sont deux moyens d'éviter la situation menaçante. Dans cette optique, la réaction physiologique de stress est complètement adaptée à la favorisation de telles réponses. En effet, les réponses physiologiques de stress préparent l'organisme à la fuite, à l'attaque ou encore à l'endurance de la situation menaçante.

Hans Selye est le chercheur qui a rendu populaire la notion de stress physiologique. Il a pu montrer que quand l'équilibre homéostatique est perturbé par une demande environnementale, l'organisme réagit toujours par une double réponse. La première est spécifique et correspond à une réponse propre aux demandes environnementales, alors que la seconde est non spécifique car elle est semblable en toutes situations. Cette dernière est une réponse innée et stéréotypée qui se déclenche d'elle-même dès que l'homéostasie est perturbée. Ainsi peu importe que l'agent stressant soit d'origine physique ou psychique, interne ou externe, objectif ou subjectif, plaisant ou déplaisant, la réponse non spécifique, physiologique, humorale et endocrinienne, sera toujours la même :

Le fait que l'agent (ou situation) que nous rencontrons soit plaisant ou désagréable n'est d'aucune importance ; l'unique chose qui compte c'est l'intensité de la demande de réajustement ou d'adaptation.

Cette réponse non spécifique, Selye a pu l'observer au cours de ses études médicales dans les années 1920 (raconté dans Le stress de la vie, 1975). En effet, Selye avait été frappé du fait que les diverses formes de réaction de choc observées en clinique — le choc des brûlés, le choc septique, le choc hémorragique, etc. — étaient toutes associées à des manifestations cliniques semblables, à savoir :

En 1936, Selye retrouva ces mêmes symptômes chez des rats à qui il avait injecté des extraits placentaires et ovariens de vaches. À cette époque, il conclut que ces extraits doivent contenir une substance nocive dérangeant le receveur. Il va cependant s'apercevoir que la réponse organique sera toujours la même quelle que soit l'injection. Selye va par conséquent en conclure qu'il existe une réaction non spécifique, toujours la même, de l'organisme pour répondre à l'agression environnementale.

Selye va consacrer sa vie à l'étude de cette réaction non spécifique de l'organisme à toute demande qui lui est faite. Dès 1950, il l'appellera le «Syndrome Général d'Adaptation» (SGA) ou encore «stress».

Le SGA représente pour son auteur la totalité des réactions de défense de l'organisme étant constant pour chaque individu. Ainsi chaque personne posséderait un SGA plus ou moins fort et ainsi aurait une capacité d'adaptation différente.

Trois grandes phases sont présentes dans le SGA : il y a dans un premier temps la phase d'alarme avec son choc et contre-choc, la phase de résistance et pour finir la phase d'épuisement. Notez que les explications qui suivent sont pondérées de recherches plus actuelles qui agrémentent le discours de Selye.

La réaction d'alarme

Cette première phase est aussi nommée «phase de choc». En effet quand nous recevons le «stimulus stressant» (ce qui nous stresse, l'événement) notre corps est confronté à un choc. Notre organisme va tout faire pour s'adapter à cette situation : cette phase correspond à la réaction par des phénomènes généraux non spécifiques face à la présence d'une demande environnementale d'adaptation à laquelle l'organisme n'est pas encore adapté. La réaction d'alarme débute dans un premier temps par un choc, un état de surprise dû à l'agression, et qui altère l'équilibre fonctionnel. C'est un état généralisé et intense de souffrance, qui rend l'organisme toujours plus vulnérable à la demande d'adaptation qui lui a été faite. Cette phase peut durer de quelques minutes à 24 heures.

Si le choc ne conduit pas à la mort, l'organisme peut se ressaisir et met en jeu des moyens de défenses actives. C'est une réaction d'urgence à court terme qui facilite l'évitement de la situation pathogène. La réponse endocrinienne et neurovégétative de cette phase, nommée «réponse sympathique ou hypothalamo-sympathico-adrénergique», peut être expliquée assez brièvement comme nous allons essayer de le faire.

Tout commence à l'hypothalamus. Par le biais du système nerveux sympathique, ce dernier stimule la médullosurrénale qui est la partie centrale des glandes surrénales (sur les reins). Cette dernière déclenche alors la sécrétion d'adrénaline et de noradrénaline. Pour plus de précision, la médullosurrénale peut aussi être activée par le dispositif nerveux à différents niveaux, autres que l'hypothalamus (région du cerveau localisée en dessous du thalamus, qui est le centre nerveux qui commande les fonctions vitales). En effet, le bulbe, la mœlle, la voie réflexe (zone sino-carotidienne, peau) ou encore le mécanisme humoral homéostatique (par la surveillance du taux d'adrénaline circulant dans le sang), sont aussi capables de stimuler la médullosurrénale (Jean Rivollier, sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995).

Il est à noter en outre que l'hypothalamus est , entre autres, en lien avec le cortex (analyse cognitive et perceptive), le système limbique (intégration de l'expérience et des réactions affectives), etc. Il y aurait par conséquent un lien entre la cognition, l'émotion, bref la vision d'une situation et la réaction de stress. Cependant, Selye n'a pas été aussi loin dans son développement en refusant l'importance de la vision de l'individu dans la réaction de stress.

Comme nous l'avons dit auparavant, après activation, la médullosurrénale se met en marche et produit l'adrénaline et la noradrénaline. Ces hormones augmentent la pression artérielle, accélèrent notre rythme cardiaque et notre respiration puis augmentent le taux de sucre dans le sang. À ce moment-là, nos pupilles se dilatent et on voit mieux. La mémoire et la réflexion se perfectionnent. Notre digestion est ralentie.

Ces dernières visent dans un premier temps la mobilisation des stocks d'énergie par les procédés de lipolyse (destruction des graisses) et glycogénolyse (mise en circulation du glycogène de réserve, par hydrolyse) dans l'objectif d'apporter une énergie suffisante aux muscles. En outre, en ce qui concerne les muscles squelettiques, les catécholamines facilitent la dégradation du glycogène et la production de lactate. En ce qui concerne le cœur, les catécholamines augmentent le débit cardiaque, la pression artérielle, le volume systolique, etc. En ce qui concerne la circulation sanguine (circulatoire), les catécholamines facilitent l'apport en oxygène des muscles au détriment des organes digestifs. Pour finir, les catécholamines stimulent la libération d'hormones au niveau de l'hypothalamus pour faciliter une reconstruction de l'énergie épuisée. Il est bien clair que la production de catécholamines a toujours bien plus d'effets que ceux mentionnés. Nous avons dû cependant ne mentionner que principaux.

En conclusion, on peut dire que la production des catécholamines par la médullosurrénale vise la mobilisation puis la dépense de l'énergie dans une réaction d'urgence à court terme (réaction ne dépassant pas quelques minutes) qui facilite la fuite ou la lutte en permettant aux organes liés au mouvement d'accroître leur fonctionnement. Cette augmentation aigue des catécholamines peut cependant avoir des effets néfastes chez certaines personnes : palpitations jusqu'à l'arrêt cardio-circulatoire par fibrillation ventriculaire, de l'angine de poitrine jusqu'à l'infarctus du myocarde. Un stress intense, même court, peut provoquer une dysfonction transitoire, d'installation particulièrement rapide et importante du muscle cardiaque, régressive en quelques jours ou semaine, nommé syndrome de tako-tsubo[3].

La phase de résistance

Cette deuxième phase forme la totalité des réactions non spécifiques génèrées par un agent stressant qui persiste et auquel l'organisme s'est adapté au cours de la phase de contre-choc.

Si le «stimulus stressant» persiste, notre organisme entame une phase de résistance. Il va essayer de rassembler des ressources pour trouver un nouvel équilibre. À ce stade, le stress est reconnu comme bénéfique pour notre organisme. A titre d'exemple, si un enfant doit réciter un poème devant la classe, il aura une poussée d'adrénaline. Ceci va perfectionner sa mémoire et stimuler sa pensée. Ce sera bénéfique pour lui. Par contre, s'il accorde trop d'importance à ces conséquences, il va devenir plus nerveux, il aura plus de tension, etc. Ce ne sera pas favorable pour lui.

La phase d'alarme est particulièrement coûteuse pour l'organisme et ce dernier se doit de compenser les pertes d'énergie. Lors de la phase de résistance, la résistance vis-à-vis de l'agent stressant est accentuée.

Au niveau endocrinien et neurovégétatif, cette phase de résistance peut s'expliquer par l'activité de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénal, mis en place dès la phase d'alarme : la sécrétion de corticolibérine (aussi nommée «Corticotropin Releasing Hormone», CRH, ou plus anciennement «Corticotropin Releasing Factor», CRF) par les noyaux antérieurs et latéraux de l'hypothalamus induisent une production de corticotropine (ACTH) par le lobe antérieur de l'hypophyse (adénohypophyse).

La présence de plus ou moins d'ACTH dans le sang, va moduler quant à elle la sécrétion de la corticosurrénale (couche périphérique de la glande surrénale) consistant entre autres :

Par cette explication tributaire de la simplification, on voit par conséquent quoique le corps est en recherche d'une nouvelle énergie, combat les inflammations envisageables et cherche à renforcer ses manques surtout au niveau ionique. Il vise par conséquent une résistance optimisée face à la situation aversive.

Les conséquences médicales peuvent être notables : après le décès d'un membre d'un couple, la mortalité du survivant est particulièrement nettement augmentée dans les quelques mois qui suivent[4]. De même, le taux de troubles du rythme ventriculaire graves s'est fortement majoré dans le mois suivant l'effondrement des «twin towers»[5].

La phase d'épuisement, les maladies de l'adaptation

En revanche, si le stress continue trop longtemps, l'organisme se fatigue. La colère ou la dépression peuvent aussi apparaître. Le stress va non seulement avoir des effets physiologiques, mais également psychologiques. Lorsque la personne est face à une situation stressante, son comportement mais aussi sa vision de l'environnement sont modifiés. Mais il ne faut pas oublier que chaque individu réagit de façon différente face à une situation identique. Ce qui peut être véritablement stressant pour nous, peut être simplement gênant pour quelqu'un d'autre. C'est notre façon de voir, de ressentir un évènement qui le rend plus ou moins stressant. Il y a des incidents, des situations qui sont reconnues comme étant stressantes généralement par la majorité des individus.

Donc, si la demande adaptative persiste, il arrive un moment où l'organisme ne peut plus apporter l'effort qui lui est demandé; il est incapable de compenser les dépenses d'énergie et nos défenses immunitaires faiblissent nous rendant plus sensibles aux agressions externes. L'épuisement va se caractériser par un retour à la phase d'origine de choc, mais cette fois les phénomènes d'épuisement l'emportent sur la défense active et peuvent conduire jusqu'à la maladie ou la mort.

L'épuisement provient du fait que l'organisme a dû fonctionner en surrégime et que par décompensation il fonctionne mal. Le cœur, les artères, l'estomac, les intestins, la peau ou les défenses immunitaires sont atteints de maladies telles que les ulcères, l'hypertension ou alors l'infarctus, l'asthme, l'eczéma, le cancer, etc. Pour tout autant, les causes ne sont pas claires : même si le stress en lui-même peut induire des changements comportementaux délétères (prise de toxiques, hyper alimentation... ), il semble qu'il puisse générer directement des anomalies et il s'agit, surtout, d'un facteur de risque reconnu de maladies cardio-vasculaires[6].

Le SGA a par conséquent ses limites, des limites physiologiques qui font que l'organisme ne peut pas aller au-delà de ses forces. Cette affirmation évidente est reprise par Holmes et Rahe (1963) qui montrent que la quantité d'unité de changement a une influence sur la santé de l'individu. Ainsi, pour 10 personnes comptant plus de 300 unités de changement en une année, 8 souffraient de problèmes de santé, comparativement à 3, 3 pour des individus ne dépassant pas le seuil des 150 unités de changement. On conçoit par conséquent bien avec les observations de Holmes et Rahe que le capital d'adaptabilité n'est pas illimité comme nous pourrions le penser et que chaque cause provoquant une réaction de stress entame ce capital.

Deux exemples prégnants s'offrent à nous pour illustrer cette idée ; dans un premier temps l'affaiblissement du dispositif immunitaire par le SGA et puis l'effet du stress sur le cerveau. Le dispositif immunitaire est largement affecté lors du déclenchement du syndrome général d'adaptation. De nombreuses expériences sur l'animal et sur l'homme l'ont montré, et selon Bær et al. , le cortisol en serait la conséquence. Il y aurait par conséquent une fragilisation de la réponse immunitaire et par conséquent de la défense de l'organisme face à des corps étrangers à l'organisme.

Selon Bær et al. , le cortisol serait aussi la cause de modifications dans le cerveau. En effet, le cortisol, produit par la corticosurrénale, agirait sur le cytoplasme de nombreux neurones. Steve Kerr et al. , (IN : Bær) ont pu montrer qu'un des effets du cortisol, au sein des neurones, était qu'il permettait l'entrée d'un plus grand nombre d'ions calcium (CA+). De cette manière le cortisol pourrait permettre au cerveau de mieux réagir au stress. Cependant, un stress chronique (dû à n'importe quelle demande) serait aussi à la base d'atteintes contre le cerveau, car une surcharge de calcium au sein de la cellule conduit à l'excitotoxicité, c'est-à-dire à la mort du neurone par un processus combiné et sans fin de rentrée de calcium au sein de la cellule, ce qui crée la libération de glutamate, ce dernier facilitant la rentrée de calcium en dépolarisant le neurone

Approche psychologique du stress

Introduction

Avec l'approche biologique du stress, nous avons vu que quand l'organisme doit s'adapter à une demande environnementale, le corps dispose d'ajustements physiologiques non spécifiques répondant à cette demande. On se rappelle que pour l'approche biologique du stress, il importe peu que l'agent stressant soit d'origine physique ou psychique, interne ou externe, objectif ou subjectif, plaisant ou déplaisant, puisque la réponse non spécifique est toujours la même et que l'unique chose qui compte c'est l'intensité de la demande de réajustement ou d'adaptation.

Comme ont pu le remarquer maints chercheurs, les organismes ne réagissent pas de la même façon quand ils sont confrontés aux mêmes événements. A titre d'exemple, certains individus tomberont malades, tandis que d'autres non (Holmes et Rahe, 1963). Il y aurait par conséquent des variables individuelles rentrant en ligne de compte quand on parle de stress. L'approche biologique a pu expliquer ces différences individuelles par le biais d'une capacité d'adaptation différente chez chaque individu. Cependant, d'autres expériences comme celle de Friedman et Rosenman avec leur pattern comportemental de type A (1959) ont montré que ces différences individuelles ne peuvent être expliquées uniquement par une capacité d'adaptabilité différente, mais également dans le fait que par un acte de pensée différent, certains individus parviennent à moduler leur stress. De cette manière le stress physiologique est diminué.

D'autres expériences, comme les effets du bruit sur l'exécution de certaines tâches, montrent aussi l'importance de variables contextuelles. En effet, un niveau sonore généralement reconnu comme stressant et perturbant peut aider à maintenir un niveau de performance quand les sujets sont fatigués comme a pu le montrer entre autres Broadbent (1971). L'approche biologique est incapable d'englober une telle découverte puisque pour elle le contexte n'est pas important. Les résultats prouvent malgré tout qu'il l'est .

En outre, comme ont pu le montrer Scott et Howard en 1970, «Certains stimulus, en vertu de leur signification spécifique pour certains individus, sont susceptibles de ne provoquer des problèmes qu'à une partie des personnes ; tandis que d'autres stimulus, de par leur signification plus largementpartagée, provoqueront des problèmes à un plus grand nombre de personnes». Il y aurait par conséquent aussi des variables socioculturelles quand on parle de stress.

La relation de cause à effet stresseur => stress est par conséquent remise en cause petit-à-petit et on se rend compte qu'il faut ajouter quelque chose à l'explication, c'est-à-dire la vision, au sens phénoménologique, qu'a l'individu de la demande qui lui est posée. Les chercheurs sur le stress vont alors aussi se pencher sur cette vision individuelle du stress en cherchant à mieux comprendre sa construction, son mode de fonctionnements, ses racines, ses effets sur l'organisme, etc.

Stress et épuisement professionnel

Le syndrome d'épuisement professionnel est un surmenage physique, épuisement professionnel ou autre, dont les répercussions psychiques manifestent un désordre "somato-psychique", tandis que le stress est une angoisse d'inadaptation ou autre dont les répercussions physiques manifestent un désordre endocrinien "psycho-somatique". Le premier, de physique, arrive au psychique et le deuxième prend son origine psychique pour déboucher sur le physique.

Le phénomène "somato-psychique" est moins populaire que le phénomène "psycho-somatique" véhiculé par la psychanalyse, dès son origine freudien.

Le traitement de l'information, l'approche cognitive du stress

Lazarus (1984) est un des leaders de l'explication psychologique, il est le premier à montrer que le stress ne peut être envisagé par un simple lien de cause à effet du type «stresseur => stress» mais qu'il y a un phénomène perceptif dynamique et individuel qui est plus important que l'agent provoquant le stress lui-même. Selye a d'ailleurs bien compris les manques de sa théorie à ce niveau en disant à la fin de sa vie : «le stress, ça n'existe pas, c'est une abstraction». Par cette phrase, il tend à souligner que l'agent stressant n'est pas celui objectivé dans la nature, mais plutôt celui qui est perçu par l'individu. L'individu n'est par conséquent pas passif, il va rechercher activement des informations en donnant du sens à ce qui l'entoure, en privilégiant certaines informations provenant de l'environnement, tout en en oubliant d'autres. C'est ainsi qu'après des années d'études du stress à partir d'un pôle seulement biologique, l'explication psychologique fait surface pour perfectionner les manques de la précédente.

Le traitement de l'information est constitué de plusieurs variables, comme on a pu le voir auparavant : l'individualité, le contexte ou encore l'approche socioculturelle de tel ou tel événement.

Pour faire court, on peut dire que le stress ici est «un état psychologique issu de la vision d'un déséquilibre entre les attentes perçues et l'autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâches». Cette définition de Jacques Larue (sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995) montre que le stress est ressenti par l'individu quand ce dernier ne se sent pas à la hauteur des demandes qu'il perçoit. Cette définition n'introduit cependant pas toute la dimension quantitative du stress, dimension modulée au niveau d'un traitement de l'information particulièrement complexe dont nous allons essayer d'en comprendre au mieux les fondements.

Quand un individu est soumis à une demande environnementale, ce dernier procède, fréquemment de manière inconsciente, à une évaluation cognitive (cognitive appraisal). Lazarus et Folkman (1984) distinguent deux sortes d'évaluation. Il y a en premier lieus l'évaluation de la situation même. Cette première évaluation (primary appraisal) se fait à partir de caractéristiques personnelles nommées ressources ainsi qu'à partir de la vision de certains facteurs environnementaux. Cette évaluation est une première ébauche de la situation telle qu'elle est perçue par l'individu. En second lieu, une seconde évaluation (secondary appraisal) est faite par l'individu, elle consiste en l'estimation de ses propres capacités à faire face à la demande. Cette estimation se fait sur la base de différentes simulations internes pour «faire face» (coping) au mieux à la demande. Après le choix d'une stratégie, l'individu peut réévaluer la situation une nouvelle fois. L'approche de Lazarus et Folkman inclut par conséquent une dynamique cyclique en intégrant un feed-back permettant au sujet de savoir si sa stratégie est efficace. Ce concept est intéressant étant donné que dès le moment où le sujet se croit capable de contrôler ou s'accoutumer à la situation qui demande adaptation, alors cette dernière perd son effet perturbateur sur l'organisme.

On constate que le traitement de l'information dans le cas d'une situation stressante découle de plusieurs variables. Nous allons les expliquer brièvement.

Les ressources personnelles

Les ressources personnelles contribuent à faire en sorte que chaque individu réagisse différemment au stress. En s'appuyant entre autres sur Dorhenwend et Dorhenwend (1974. In Paulhan et Bourgeois, 1991, p.  34), on peut dire que les ressources personnelles pour faire face à une situation de crise, sont multiples. Citons-en quelques unes :

Les ressources personnelles sont par conséquent, comme on peut le voir, multiples. Ces ressources sont toutes plus ou moins différentes pour chaque individu et il se peut aussi que certaines ressources soient partagées plus que d'autres. Pourtant, si on dressait le profil psychologique des ressources de chacun, il y a de fortes chances pour que chaque individu soit différent des autres. Cette différence pourrait être une explication de la diversité des réponses en situation stressante.

Les facteurs environnementaux

Certains facteurs environnementaux sont pris en compte par l'individu, d'autres non. Un autre individu pourrait particulièrement s'appuyer sur d'autres indices situationnels pour donner sens à ce qu'il perçoit. En réalité, tout dépend de ce qui est prégnant pour lui. Ce qui fait sens pour l'individu dépend de ses propres ressources personnelles.

Les caractéristiques de la situation, le soutien social perçu, les influences socioculturelles, l'âge, le niveau socioculturel, la profession, etc. peuvent être des classes d'indices utiles à l'individu pour son évaluation de la situation.

Certains facteurs environnementaux servent d'indices presque chaque fois qu'ils sont présents dans la situation qui demande adaptation, et ceci par presque l'ensemble des individus. C'est surtout le cas de la prévisibilité et de l'habituation :

La prévisibilité permettrait de diminuer les effets du stress comme a tenté de le prouver Weiss (1972) avec son expérience sur des rats. Dans cette expérience la variable indépendante était la possibilité ou non de prévoir une décharge grâce à un signal lumineux puis d'appuyer sur un bouton pour arrêter cette décharge. La variable dépendant était la grosseur moyenne des ulcères et il fut évident que les rats les plus touchés par des lésions stomacales étaient ceux qui n'avaient pas été avertis à l'avance. Cependant, d'autres études (Laborit) ont pu montrer que le fait d'être averti d'un danger et de ne pas pouvoir agir sur lui était toujours pire que le fait de ne pas pouvoir agir sans être averti. Ainsi la prévisibilité est un modérateur de stress pour tout autant que l'organisme se sente en mesure de contrôler l'agent stresseur.

L'habituation, modérateur du stress, est un «terme désignant la diminution progressive et la disparition d'une réponse normalement génèrée par un stimulus quand ce dernier est répété. […] Le terme d'habituation s'emploie pour une réponse inconditionnelle non apprise, telle que la réaction d'orientation observée quand un stimulus nouveau apparaît dans le champ perceptif» (Richard, 2002). Ainsi dans l'exemple d'un stress, la chronicité de ce dernier désensibilise en partie l'organisme, ce qui permet une approche moins stressante de l'agent provoquant le stress.

En conclusion, on peut par conséquent dire que certains indices environnementaux sont utilisés par n'importe qui dès que c'est envisageable, alors que d'autres seraient en fonction d'un consensus moins beaucoup partagé et dépendent par exemple de la culture, de la profession, d'une certaine croyance, etc.

La théorie de la motivation

Découlant essentiellement d'auteurs tels que Dewey, Toynbee, Cohen (1980. In Daillard, 2002) ou encore Low et McGrath (1971. In Daillard 2002), cette théorie stipule que la vision d'une situation stressante est un puissant stimulant et conduit toujours à une motivation supplémentaire. Par là même, la performance est perfectionnée. Ici, le stress est vécu comme un défi que l'individu se fait un honneur de surmonter. Au contraire, un manque de stress conduirait à une motivation diminuée.

Cette théorie nous paraît de premier abord particulièrement simpliste quand on parle du lien qu'il y a entre le stress et la performance de l'adaptation. En effet, un stress provoquant un supplément de motivation peut particulièrement être observé chez des individus ayant un comportement de type A qui se complaisent dans l'urgence. Cependant, qu'en est-il des individus ayant des comportements de type B et qui ne sont en aucun cas motivés intrinsèquement par des conditions stressantes pour effectuer une performance ? Il semble bien clair que cela ne soit pas le cas.

En outre, le lien stress par conséquent motivation supplémentaire ne fonctionne que si l'individu a un haut degré d'attente d'efficacité (voir «traitement de l'information») qui le motive intrinsèquement à performer au maximum de ses capacités.

La théorie de la motivation, malgré une validité douteuse, nous fait cependant remarquer que la réponse de stress n'est pas l'unique facteur influençant la performance. Par conséquent, si on veut étudier le lien entre le stress et la performance adaptative, il faut avant tout trouver les autres variables influencants elles aussi la performance. De cette manière, ces autres variables ne formeront plus des variables parasites si elles sont prises en compte.

La motivation pourrait par conséquent être un des multiples facteurs entrant en interaction avec le stress et déterminant la performance. Pour des raisons de scientificité, les chercheurs ont fréquemment substitué le terme «effort» à celui de «motivation», ce premier étant observable et objectif par la quantité d'énergie dépensée par l'organisme, mais dépendant directement de la motivation.

La théorie de l'attente de Vroom (1964) stipule que l'effort consacré à une tâche dépend de trois variables.

Il y a premièrement «l'attente» qui est la conviction qu'un effort d'une certaine intensité entraînera une certaine performance. Le sujet peut penser qu'il n'y a pas ou peu de relation entre son effort et la performance qu'il obtient. Son attente serait alors faible ou nulle.

Deuxièmement, «l'instrumentalité» qui est la vision des chances d'obtenir la récompense escomptée si la tâche est réalisée.

Et pour finir, la «valence» qui correspond à l'importance que le sujet donne à la récompense obtenue en cas de réussite.

Cette théorie, en décortiquant les raisons motivationnelles qui poussent un individu à apporter un certain effort, sous-entend aussi que les sources de stress inhibant la performance peuvent être multiples dans ce processus.

Dans un premier temps avec l'attente : comme on vient de le voir, le sujet peut penser qu'il n'y a que peu de rapport entre son effort et sa performance. Dans ce cas, il a un degré d'attente bas. Pour nous, ce dernier correspond à un manque d'attente d'efficacité tel que nous l'avons défini dans l'approche cognitive du stress. Or nous avons vu que ce degré d'attente d'efficacité était un puissant modérateur de stress. Bandura (1985. In Spencer, 2000) a pu le prouver en démontrant que quand une personne se trouve en présence d'objets qui lui font peur, un haut degré d'attente d'efficacité est accompagné d'un faible taux d'adrénaline et de noradrénaline dans le sang. Bandura n'est pas l'unique chercheur à avoir pu montrer cet état de fait, d'autres chercheurs, s'intéressant surtout aux compétitions sportives, ont pu le montrer aussi.

Le «degré d'attente d'efficacité» ou «attente» est par conséquent une variable qui module tout à la fois le stress et la motivation. Ainsi, du moment qu'une performance est entre autres fonction de ces deux variables, le degré d'attente d'efficacité est doublement bénéfique.

Pour l'instrumentalité se pose le problème de l'incertitude, c'est-à-dire quand le sujet n'est pas en mesure de savoir ses chances de réussite lors d'une tache accomplie au mieux. Là aussi, ce facteur est constitutif en même temps de la motivation mais aussi de la réaction de stress. En effet, si l'incertitude provoque la démotivation, elle est aussi à la base d'une réaction de stress exacerbée. Cela peut être expliqué simplement : nous avons vu auparavant qu'un lieu de contrôle interne était capable de modifier fortement le stress. En effet, les individus pensant que tout sur terre est fondé sur le principe méritocratique- à chaque peine, son mérite et sa récompense- sont moins à même d'éprouver du stress que les gens comprenant que la principe méritocratique n'est pas entièrement vrai et qu'il réside une grande part d'incertitude dans la réussite de nos actions.

L'incertitude, entrevue dans un lieu de contrôle externe, est par conséquent un facteur constitutif du stress et de la motivation, tout comme le degré d'attente d'efficacité.

Pour finir, la valence, c'est-à-dire l'importance accordée à la récompense, peut elle aussi conduire a un stress supplémentaire. En effet, que dire d'un individu qui désire fortement un résultat (valence haute) tout en ne pensant pas disposer des ressources nécessaires à la réussite de ce résultat ? Ce type d'individu sera clairement soumis à une forte dose de stress.

On voit par conséquent que les variables constitutives de la motivation sont aussi toutes présentes dans l'explication de la réaction de stress. En outre, selon la théorie de la motivation de Vroom et la définition du stress que nous avons donné jusque là, stress et motivation sont fortement corrélés : la démotivation est synonyme de stress dysfonctionnel et conduit à une performance dégradée, alors que la motivation est synonyme de stress fonctionnel et conduit à une performance perfectionnée.

La théorie de l'attente de Vroom est par conséquent totalement en accord avec la théorie de la motivation. Cependant, le pôle motivationnel du stress, quoique présent, n'est pas l'unique, et ce dernier est plus que le découlant automatique et unique de la motivation. Fort de ce propos, nous allons continuer sur une théorie totalement différente qui pense que le stress est contreproductif.

Les stratégies de coping et stratégies d'ajustement

Le mot «coping» vient du verbe anglais «to cope with» dont il faut retenir la signification de «faire face à». Selon Lazarus (1984), les capacités à «faire face» ou «coping» correspondent à la totalité des pensées et des actes développés par le sujet pour résoudre les problèmes auxquels il est confronté et ainsi de diminuer le stress qu'ils génèrent, le coping vise par conséquent la minimisation du lien stress-détresse. Le coping est toujours présent quand l'individu a perçu une demande d'adaptation et comprend énormément de processus tout autant conscients qu'inconscients.

Concernant les processus inconscients, nous pouvons citer les mécanismes de défenses observés par Freud comme le déni, le déplacement, l'agressivité objectale, l'intellectualisation, etc.

Les processus de coping conscients sont soumis aux lois de l'apprentissage; on les nomme alors les stratégies d'ajustement au problème. Ces stratégies sont constituées de trois grandes classes : les stratégies d'ajustement axées sur le problème, axées sur les émotions et pour finir sur l'hygiène de vie (Spencer, 2000).

Toutes les stratégies d'adaptation axées sur le problème visent la diminution ou l'élimination du stress par un acte cognitif et comportemental en agissant directement sur la source du stress. L'attaque, l'évitement, les techniques de résolution de problèmes forment des stratégies axées sur la résolution du problème. Quelquefois, le problème ne peut être changé et il faut s'en accoutumer tant quoique mal. Les stratégies d'adaptation axées sur les émotions peuvent rendre alors un grand service à l'individu. Elles correspondent à une stratégie cognitive et émotionnelle qui sert à diminuer, ou alors d'éliminer le stress en percevant la source de stress différemment. La relaxation sous ses diverses formes (training autogène, Jakobson-Wolpe, sophrologie, Yoga, méditation, oraison, etc. ), l'humour, l'expression des émotions, la comparaison sociale, sont des stratégies d'adaptation axées sur l'émotion. Pour finir, les stratégies d'adaptation axées sur l'hygiène de vie facilitent la prévention à la guérison. En pleine forme l'individu sera plus à même de supporter les demandes environnementales.

Une approche cognitivobiologique du stress et sa fonction dans l'adaptation

L'explication biologique ne nous a paru pas suffisante pour expliquer un concept aussi complexe que le stress. En effet, comme nous l'avons vu, une telle explication n'inclut à aucun moment le psychisme de l'organisme qui perçoit la situation selon certains cadres de pensée ; dans l'explication biologique du stress la réaction de stress est directement liée à une situation provoquant le stress, cette dernière tenant lieu de référant objectif vis-à-vis du stress ressenti.

Cependant, comme on peut le constater ensuite même avec des procédés aussi simples évolutivement parlant que l'habituation, la réaction de stress est toujours fonction d'une demande perçue par l'organisme, et non selon la demande objective elle-même. Cette position est en accord avec la pensée cognitiviste qui pense qu'entre la situation réelle et la réaction de stress, il y a tout un traitement de l'information, principalement différent chez chacun, et qui serait capable de moduler le stress ressenti.

Une autre limite de l'explication biologique a déjà été mentionnée, c'est le concept de non-spécificité de la réaction de stress ; c'est une réponse innée et stéréotypée qui se déclenche d'elle-même dès que l'homéostasie est perturbée. Ainsi peu importe que l'agent stressant soit d'origine physique ou psychique, interne ou externe, objectif ou subjectif, plaisant ou déplaisant, la réponse non spécifique sera toujours la même. Si on se souvient nous avions remis en doute cette non spécificité de la réaction de stress pour deux raisons principales.

Premièrement, le lien entre hypothalamus et cortex en plus du dispositif limbique laisse présager que ce n'est pas uniquement la quantité d'adaptation demandée (par le biais des émotions) qui est transmise à l'hypothalamus, mais également la qualité de cette adaptation par une vision provenant du cortex.

Deuxièmement, plusieurs auteurs nuancent les travaux de Selye, et mettent en évidence des patterns de réponses au stress présentants des différences. A titre d'exemple, Cox & Cox (1985. In Rivollier, sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995) observent des différences de réponse sécrétrices d'adrénaline et de noradrénaline à diverses situations de stress. Ils montrent aussi une sensibilité de sécrétion suivant les caractéristiques du travail telles que le mode de rémunération et la cadence de travail. La conclusion de cette étude est que l'activation de noradrénaline est en relation avec l'activité physique, les contraintes psychologiques et les frustrations génèrées par les types de tâches, tandis que l'activation d'adrénaline est liée au sentiment d'effort et de stress.

Concernant l'explication physiologique, les conclusions de Cox et Cox sont particulièrement intéressantes. En effet, noradrénaline et adrénaline, quoiqu'ayant la même fonction durant la phase d'alarme, n'ont pas le même potentiel de transmission de l'information : l'action de l'adrénaline est une forme atténuée de l'action noradrénergique. Ceci s'explique par une sensibilité réduite des récepteurs noradrénergique alpha pour l'adrénaline. Ainsi, l'hypothèse qu'on peut faire est que la médullosurrénale diminue la production de noradrénaline au profit de l'adrénaline, conduisant à une phase d'alarme diminuée avec les avantages que cela peut apporter dans certaines situations.

Non-spécificité de la réponse et objectivisme «contre-phénoménologique», sont par conséquent les deux grandes critiques qu'on peut faire à l'explication biologique et en particulier l'explication de Hans Selye.

La position cognitiviste quant à elle , n'a pas eu le même genre de problèmes. Elle a eu cependant des difficultés à relier le psychisme aux points forts de l'explication biologique. Ainsi, on a pu voir des définitions du stress excluant le pôle physiologique du stress, comme c'est le cas avec la position de Jacques Larue (sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995)  : «un état psychologique issu de la vision d'un déséquilibre entre les attentes perçues et l'autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâche».

Mais le stress est aussi un état physiologique, comme peuvent nous le montrer de multiples exemples de la vie quotidienne. D'ailleurs, des auteurs tels que Selye ont pu montrer l'impact du stress sur le corps avec les maladies dites «de l'adaptation». Par conséquent, on ne peut rayer le pôle biologique du stress et on se doit de l'intégrer à une définition englobante.

Si on regarde la littérature sur le stress, il y a eu assez peu d'essais entrepris pour relier exactement les deux explications. Nous allons essayer d'en donner une comme hypothèse et qui rassemble ce qu'on a vu depuis le début de ce travail :

Tout débute par la vision de la situation constituée d'un traitement cognitif et émotionnel de l'information. Ce traitement de l'information est constamment remis à jour.

Le pôle émotionnel du traitement de l'information est en relation avec l'activation de la réaction de stress physiologique, comme a pu le montrer Cannon. Il a observé qu'une émotion déclenchait la sécrétion de catécholamines, provoquant ainsi la réponse immédiate du syndrome général d'adaptation. Concernant l'aspect physiologique, l'émotion pourrait transmettre comme information à l'hypothalamus, la quantité d'ajustement (adaptation) à apporter.

Le pôle cognitif du traitement de l'information pourrait transmettre des informations à l'hypothalamus sur la nature de la situation perçue. Ce renseignement pourrait permettre ensuite une plasticité de la réponse de stress selon la situation.

Sans pour tout autant rentrer plus dans les détails physiologiques- cela prendrait trop de temps- l'apport principal de ce schéma est qu'il lie d'une manière directe le traitement cognitif et émotionnel de l'information à la réaction physiologique de stress, réaction qu'il considère comme spécifique. Pour ces deux raisons, le schéma s'écarte de la définition du stress faite par Selye.

On a vu auparavant les avantages d'une réponse spécifique de stress : le fait que la médullosurrénale diminue la production de noradrénaline au profit de l'adrénaline, pourrait conduire à une phase d'alarme moins violente. Ainsi la vision de certaines situations pourrait conduire à une phase d'alarme moins violente.

Affinement du lien entre le stress et l'adaptation

Nous avons tenté jusqu'désormais de donner une définition globale du stress comme une réaction psychique et physiologique résultant de la vision d'une atteinte de l'environnement, cette atteinte demandant un effort d'adaptation. À partir de cette définition, nous avons tenté de donner les conclusions directes de l'implication de la réaction de stress dans l'adaptation. Principale de ces conclusions était de dire que la vision de l'individu tenait une place centrale dans le déclenchement physiologique d'une réaction de stress. En allant plus loin, nous avons suspecté que les effets du stress sur la performance étaient en partie le résultat de modifications au niveau du traitement de l'information.

Empiriquement parlant, nous avons pu justifier cette position en montrant qu'il existait des modulateurs psychologiques de stress (voir plus haut «le traitement de l'information»), modulateurs qui avaient l'air d'avoir une influence sur la réaction de stress, et par la même sur la performance.

Certaines théories, plus ou moins d'actualité, évoquant le lien entre le stress et l'adaptation pourraient être mentionnées ici ; les théories de la motivation, de l'interférence ou encore de la combinaison font partie de celles-là. Ces diverses pensées, si elles ne sont pas forcément validées en totalité par la Recherche actuelle, ont néanmoins le mérite d'ouvrir le débat sur de nouveaux facteurs influencés et influençant le stress mais aussi la performance adaptative.

Stress et performance adaptative

Il semble que la circularité des concepts de stress et de performance adaptative soit en partie la raison d'un manque de précision en ce qui concerne le concept de performance de l'adaptation :

Ce concept de performance de l'adaptation est si englobant que nous pouvons le retrouver dans l'ensemble des situations de la vie et dans n'importe quelle action de l'individu ; être performant veut dire quelquefois être rapide, d'autres fois être intelligent, d'autres fois toujours savoir s'arrêter à temps, etc. À partir de cela, discourir sur le lien entre stress et performance adaptative paraît être une démarche illusoire car énormément trop globale et complexe. En réalité, il paraît complexe de vouloir tirer un lien général entre stress et performance à partir d'une grande variété de situations aussi différentes les unes que les autres.

Dans cette optique, Hockey a pu montrer que la performance demandée était différente selon la situation. De même, il a pu montrer que le lien entre le stress et des performances spécifiques n'était pas forcément le même.

Le stress n'a pas la même influence sur les performances de vigilance, d'attention de vitesse et de précision. Inutile par conséquent de dire qu'un lien général entre stress et performance est illusoire.

De par son expérience, Hockey attire notre attention sur le fait que la provenance du stress influe aussi sur la performance. Ainsi, une situation stressante de bruit n'aura pas le même effet sur la vigilance qu'un excès de travail.

Hockey nous montre par conséquent qu'il existe différents stress spécifiques, mais aussi des performances spécifiques et qu'il est illusoire de vouloir trouver un lien général entre stress et performance.

Dans l'optique de Hockey, nous aurions par conséquent dû préciser une situation précise avec la définition de performances demandées spécifiques. De même, le genre de stress auquel l'individu aurait été soumis, aurait dû être précisé. À partir de là, nous aurions été en mesure de déterminer la relation exacte d'une situation spécifique de stress sur certaines performances, elles-mêmes spécifiques.

Mais la spécificité des concepts de stress et de performance n'est pas l'unique raison qui empêche de trouver une relation entre eux; dans la Recherche il existe aussi plusieurs problèmes qui empêchent la découverte de liens stables entre stress et performance adaptative.

A titre d'exemple, l'expérimentation ne peut pas vérifier la quantité de stress ressentie par l'individu dans la mesure où elle n'influe que sur la situation expérimentale elle-même. En effet, selon l'approche cognitiviste, toute la dimension perceptive ne peut être contrôlée expérimentalement. Qui plus est , cette vision sera différente pour chacun, ce qui fait qu'à situation expérimentale égale, les gens ne seront pas stressés de la même manière.

En outre, la condition expérimentale, par mesure éthique, ne peut normalement se permettre de pousser l'individu dans ses retranchements et de créer chez lui un stress. En effet, créer de la souffrance chez quelqu'un n'est pas acceptable moralement.

Pour finir, le stress étant un concept particulièrement "à la mode" depuis Selye, chaque individu a une conception spéciale de ce qu'est le stress et de sa relation avec la performance. Au début de ce travail, on a vu que les individus pensaient pour la majorité que le stress était un élément perturbateur dans le perfectionnement de leur performance. À partir de là, des théories implicites peuvent apparaître et biaiser les résultats d'expériences étudiant le stress et la performance adaptative.

La relation entre le stress et performance adaptative est complexe à étudier car les concepts sont trop globaux et qu'ils sont moralement complexes à étudier, qu'ils sont pris en compte dans des théories implicites et d'une façon plus générale perçus différemment par chacun. À partir de là, il semble illusoire de construire une théorie du stress et de l'adaptation. Cependant, les idées de Hockey pourraient former une voie envisageable en fractionnant les concepts. Elle permettrait une approche bien plus fine des différents types de stress et de performances. Qui plus est , elle éviterait les écueils de théories implicites.

La théorie de l'interférence

Cette pensée stipule que le stress est contre-performant par le fait qu'il demande du temps et de l'énergie pour lutter contre le stress par le biais des stratégies de coping. De cette manière, cette même énergie et temps ne sont pas utilisés pour résoudre la demande perçue par l'organisme (Daillard, 2002).

Si cette théorie de l'interférence paraît de premier abord douteuse, elle introduit tout de même la notion d'énergie. Cette énergie, limitée, ne peut être en aucun cas utilisée partout et en même temps. Le choix de l'organisme pour mettre en place une stratégie de coping va par conséquent faciliter la contre-performance.

Cette notion d'énergie, quoique présente sous une autre forme, est un concept qui est déjdésormais dans l'approche biologique du stress. En effet si on se souvient, le corps durant la phase de résistance était bien plus endurant face au stimulus aversif, tout en étant bien plus vulnérable à une nouvelle phase d'alarme. Nous verrons plus tard avec le modèle de Sanders (1983) que l'énergie disponible ou manquante pourrait avoir un effet sur la performance adaptative.

La théorie de la combinaison

La brique centrale de cette théorie est constituée de la loi de Yerkes et Dodson (1908). Ces deux chercheurs ont été les premiers à décrire la relation quadratique entre le niveau d'activation et la performance dans une tâche d'apprentissage.

L'étude de Yerkes et Dodson portait sur des souris soumises à des chocs électriques d'intensité variable sur chaque erreur discriminative visuelle. Les résultats montrèrent une moins bonne performance de rétention pour des chocs électrique de faible ou forte intensité, les meilleures performances des souris étant obtenues par des chocs d'intensité moyenne.

Cette relation dite en «U inversé» qui prédit que la performance la meilleure sera atteinte par un niveau d'activation moyen, a été plus ou moins bien commentée par maintes recherches qui tentaient d'expliquer ce phénomène contre-intuitif. Ainsi certains chercheurs ont expliqué la relation en U inversé par un changement de stratégies cognitives (Tyler et Tucker, 1982 In Jean Rivollier. Sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995) par le rétrécissement du champ attentionnel (Easterbrook, 1959. In Jean Rivollier. Sous la direction de Le Scanff et Bertsch, 1995), etc.

Une des meilleures explications apportées pour expliquer la loi de Yerkes et Dodson a été donnée avec la théorie de l'éveil de Scott (1966. In Daillard 2002). Cette théorie pense que le niveau d'éveil du cerveau détermine le degré d'attention face à un stimulus. Ainsi l'éveil jouerait un rôle particulièrement important dans le traitement de l'information et par là même dans la performance. De la même manière que la loi de Yerkes et Dodson qui évolue de manière quadratique, la théorie de l'éveil pense que seul un éveil moyen permet une performance accrue. Par contre, un éveil faible ou fort conduirait à une performance amoindrie.

Cette théorie de l'éveil peut paraître assez abstraite et contre intuitive. Elle est basée cependant sur des études solides telles que celle de Wilkinson (1963) qui a pu observer une relation quadratique entre l'interaction du bruit et du manque de sommeil, et l'efficacité-précision de temps de réaction.

Les résultats de cette recherche sont surprenants : le bruit, élément fréquemment reconnu comme stressant peut être tout autant bénéfique que perturbant selon la fatigue du sujet. Pour le dire autrement, un sujet en forme et en présence de bruit est moins performant que s'il était dans un environnement silencieux. Par contre un sujet fatigué et en condition de bruit environnemental sera bien plus performant que s'il était dans un environnement silencieux ! Cette expérience corrobore merveilleusement la théorie de l'éveil de Wilkinson.

On a fréquemment vu la loi de Yerkes et Dodson se généraliser au stress ainsi qu'à la performance. Mais tout comme la motivation, on ne peut pas dire que seul l'éveil est constitutif du stress et de la performance de l'adaptation.

Le modèle énergético-cognitif du stress et de la performance de Sanders (1983)

Le modèle énergético-cognitif du stress et de la performance de Sanders (1983. In Davranche. 2003) présente les étapes et les mécanismes du traitement de l'information. Il a aussi l'avantage de prendre en compte l'effet de l'effort (dû à la motivation, c. f. la théorie de la motivation) et de l'éveil (c. f. Wilkinson). Le concept d'énergie (c. f. la théorie de l'interférence) y est repris.

Le modèle de Sanders (1983) est le résultat d'un conglomérat de deux approches du traitement de l'information. La première est l'approche computationnelle qui pense que la performance dépend de la qualité du traitement de l'information, traitement effectué par une succession de stades opérants des transformations de représentation (Sternberg, 1969. In Davranche). Dans cette optique, Sanders crée le «modèle sériel discret» (1980), modèle qui sera à la base de celui de 1983.

Le modèle sériel discret pense que le traitement de l'information est constitué de 4 étapes :

  1. À partir d'un stimulus de départ, le cerveau effectue un pré-traitement de l'information. À ce stade, c'est l'intensité du stimulus perçu qui est dégagée ;
  2. La seconde phase du traitement de l'information correspond à l'extraction des caractéristiques (qualités) du signal ;
  3. Une troisième phase qui va consister dans le choix de la réponse selon le stimulus ;
  4. La dernière phase est un ajustement moteur face à une incertitude temporelle.

La seconde approche adoptée par le modèle de Sanders (1983) est l'approche énergétique qui pense que la performance doit être expliquée en termes de quantité de ressources allouées à une tâche.

Sanders reprend les trois mécanismes énergétiques de Mcguiness et Pribram (1980. In Davranche, 2003)  :

Pour que l'explication soit complète, l'existence d'un mécanisme d'évaluation est importante pour juger du fonctionnement approprié de l'éveil et de l'activation. L'information utile à l'évaluateur provient de deux retours d'information (feed-back).

Le premier feed-back renseigne l'évaluateur sur l'état physiologique du dispositif. Il provient directement de l'éveil et de l'activation et il sert à déclencher une action immédiate de l'effort en cas de déséquilibre entre ces mécanismes.

Le deuxième feed-back renseigne l'évaluateur sur la performance cognitive ou comportementale réalisée. Il est comparé à la performance ainsi qu'à l'état, obtenu par cette dernière, voulus par l'individu. Il paraît vraisemblable que la performance parfaite et l'état parfait voulus par l'individu soient changeants et dépendent de nouvelles informations sur le stimulus, de nouveaux buts voulus, etc.

Quand le feed-back de la performance obtenue n'est pas jugé suffisant par l'évaluateur, ce dernier active légèrement plus l'effort. Ce dernier quant à lui, active légèrement plus l'éveil et l'activation puisque, en l'état, ils ne permettent pas d'assurer une performance suffisante.

Nous avons vu jusque là le traitement de l'information de Sanders sans y voir apparaître le stress. Nous y venons désormais. Pour l'auteur de ce modèle, le stress correspond à une sensation subjective désagréable de l'évaluateur quand un déséquilibre énergétique ne peut être compensé par l'effort. À partir d'une telle définition, nous pouvons ressortir cinq causes principales de stress :

  1. il y a un déficit en éveil qui ne peut être compensé par un effort (ex : le sujet en privation de sommeil devant conduire sur l'autoroute de nuit)  ;
  2. il y a un déficit en activation qui ne peut être compensé par un effort (ex : la maladie de Parkinson avec une dégénérescence précoce des neurones dopaminergiques et ralentissement des fonctions motrices)  ;
  3. il y a une sur-stimulation du mécanisme de l'éveil qui ne peut être enrayée par un effort (ex : le sursaut dû à une simulation sonore)  ;
  4. il y a une sur-stimulation de l'activation qui ne peut être enrayée par un effort (ex : schizophrénie souffrant d'une hyperactivité des dispositifs dopaminergiques)  ;
  5. l'effort investi dans une tâche ne peut résoudre le problème posé (ex : problème trop complexe comparé à la motivation).

Comme on peut le constater, Sanders a une vision particulièrement large de ce qu'est le stress. Nous pouvons constater que l'effet de la loi de Yerkes et Dodson se fait ressentir, puisque le stress est tout autant dans la sur-stimulation que dans la sous-stimulation.

On comprend aussi dans cette définition de Sanders qu'un effort puissant, provenant d'une motivation forte de l'individu, forme une barrière protectrice contre la plupart de situations de stress. Un effort puissant permet une meilleure performance et par conséquent une meilleure adaptation au problème. Dans ce modèle ce n'est pas vraiment le stress qui a un effet sur la performance mais plutôt cette dernière, dans un rapport «performance perçue / demande perçue» Parce qu'elle ne peut pas être perfectionnée, tout étant insuffisante pour l'individu (demande perçue), la performance fait ressentir un stress de l'évaluateur ! Cette conclusion pose le problème compliqué de la circularité de la relation stress-performance.

Remise en cause de la linéarité de la relation entre le stress et la performance

L'approche cognitiviste face à l'approche biologique a aussi posé ce problème de la circularité des concepts de stress et de performance adaptative. En effet, on se souvient que la définition cognitiviste du stress était un état psychologique issu de la vision d'un déséquilibre entre les attentes perçues et l'autoévaluation de ses propres capacités à rencontrer les exigences de la tâche. Il nous apparaît désormais particulièrement clair que cette définition inclut le fait que le rapport performance / demande influe sur le stress.

Dans le modèle cognitiviste du traitement de l'information, la performance prise en compte par l'individu se situe à deux niveaux :

  1. premièrement, au feed-back vers le traitement de l'information directement après un comportement adaptatif. Ce feed-back exprimerait à l'évaluateur la nature et la quantité de la réponse restant à apporter. Ici, on se rapproche du modèle de Sanders où le stress serait dû à un rapport «performance perçue/Demande perçue» négatif.
  2. deuxièmement, et c'est là le génie de l'approche cognitiviste, le stress pourrait aussi être influencé par un rapport négatif entre la performance attendue et la demande perçue, où la performance attendue correspondrait à une évaluation de la performance future obtenue avec des stratégies de "coping" choisies dans le présent !

Pour résumer, le stress proviendrait du fait qu'on ne se sente pas à la hauteur de ce qu'on pense devoir faire pour être adapté. En outre, le fait que l'être humain soit capable de se représenter dans le temps à partir du présent, pourrait conduire à ce qu'il ressente un stress dû à un événement qui n'est pas encore arrivé (c'est le stress vu au deuxième) ou d'un événement qui est déjà arrivé comme dans la cas d'un stress post-traumatique.

D'autre part, le stress joue aussi un rôle sur la performance de l'adaptation, comme le démontrent l'ensemble des études biologiques du stress. Selye a pu montrer par exemple, que la réaction de stress mettait l'organisme dans un état tel qu'il favorisait la lutte et la fuite qui sont des manières d'éviter une situation à laquelle on ne peut s'adapter. Or, éviter effectivement une situation à laquelle on ne peut s'adapter, veut dire, entre autres, qu'on est adapté à son environnement.

De plus, Selye a pu montrer que quand l'organisme ne pouvait éviter la demande d'adaptation qui lui était faite, alors ce dernier accroissait sa résistance à cette demande, ce qui montre toujours le lien du stress avec la performance adaptative.

En conclusion, il semble impossible de supprimer la circularité de concepts tels que le stress et l'adaptation sans léser une des théories du stress. Qui plus est , est-il vraiment utile et envisageable de le faire ?

Le stress au travail

Le stress est fréquemment présent dans le cadre de la vie professionnelle. Quelquefois, les entreprises exigent énormément de leurs cadres. Ceci va provoquer une situation de stress, de pression. Énormément de gens se plaignent d'être stressés au travail. Il a la plupart de raisons pour stresser au travail : des clients impossibles, un patron trop strict, des collègues affreux, des commérages au bureau, des délais trop courts, etc.

Il y a des personnes qui aiment la poussée d'adrénaline au travail. Cela les stimule, leur redonne de l'énergie d'être confrontées au stress ; elles se sentent revitalisées. Néanmoins, ce n'est pas le cas de n'importe qui. Certains se sentent plutôt abattus et ceci est peut être dû au stress dans le cadre du travail. Voilà quelques signes qui exposent la situation de ces derniers :

Le stress au travail est reconnu sur le plan international, européen et national comme une préoccupation à la fois, des employeurs et des travailleurs. Ayant identifié l'obligation d'une action commune spécifique sur cette question et anticipant une consultation sur le stress par la Commission, les partenaires sociaux européens ont signé, le 8 octobre 2004, un accord sur le stress au travail dans le cadre de l'article 138 du Traité CE.

Statistiques

Voici à présent quelques statistiques tirées du livre «gérer son stress» pour les nuls de Allen Enking :

Il existe, aux États-Unis, un institut et des métiers de sécurité et de la santé, le NIOSH (National Institute for Occupational Safety and Health). Ce dernier a réalisé le classement ci-dessous. Il a regardé dans les fichiers des hôpitaux et défini quels gens (appartenant à des professions précises) avaient le plus de symptôme liés au stress.

La liste gouvernementale des 10 emplois les plus stressants :

1. Ouvriers

2. Secrétaires

3. Inspecteurs

4. Managers

5. Opérateur de machines

6. Techniciens de laboratoire cliniques

7. Chefs de bureau

8. Contremaîtres

9. Serveur/euse

10. Propriétaires fermiers

La liste suivante a été élaborée selon des informations remises par deux organismes américains, le National Institute on Workers Compensation et L'American Institute of Stress.

La liste des 10 jobs les plus stressants des instituts :

1. Instituteur/trice des écoles urbaines

2. Officier de police

3. Mineurs

4. Contrôleurs de trafic aérien

5. Interne des hôpitaux

6. Courtier en valeurs mobilières

7. Journaliste

8. Personnel des services clients/réclamation

9. Serveuses

10. Secrétaires


Un chercheur californien examine scientifiquement, depuis des années, le stress professionnel. Il a découvert deux facteurs importants dans le travail :

- La latitude de décision : le contrôle qu'un travailleur a la sensation d'avoir sur ce qu'il fait. - Les exigences psychologiques : les exigences et pressions du travail.

«Un job à "haute tension" est un job où les exigences du travail sont fortes, mais où le contrôle du travailleur est faible.»

La liste scientifique des jobs les plus stressants :

1. Serveurs/euses

2. Ouvrier sur chaîne de montage

3. Assistants soignants

4. Ouvriers de l'industrie du vêtement

5. Perforatrices

6. Opérateurs de téléphone

7. Caissiers

8. Typographes


Ces trois listes sont trois points de vue différents. Après avoir lu la première liste, on peut être surpris comme je l'ai été. Je me suis dit que ce ne sont pas des métiers spécifiquement stressants. Lorsque on parle de job stressant à quelqu'un, il pense le plus fréquemment à des professions plus excitantes, comme officier de police, pompier, ambulancier, des personnes qui travaillent dans la bourse, etc. Le livre nous donne une explication envisageable toute simple : peut-être n'y avait-il pas énormément de policiers et de gens exerçant ces métiers dans cet hôpital. On peut cependant remarquer que la majorité des jobs stressants sont ceux où les personnes sont constamment pressés, ou alors des métiers trop stricts.

Nous constatons que les serveurs et serveuses sont ceux qui apparaissent sur les trois listes. Nous pouvons par conséquent en déduire qu'ils ont le job le plus stressant. Effectivement, ils sont toute la journée debout, en train de courir, de se dépêcher. Quand il y a énormément de monde dans le restaurant, ils sont d'autant plus stressés. Les clients s'impatientent fréquemment. Les serveurs doivent faire tout leur envisageable pour les servir rapidement. D'autant plus qu'il y a des clients qui rouspètent, qui n'arrivent pas à se décider rapidement, qui veulent être servis plus rapidement, qui ne sont pas contents.


La liste des jobs les moins stressants : Ces professions sont moins strictes et sont plus contrôlées.

1. Réparateurs

2. Chercheurs en sciences naturelles

3. Architectes

4. Programmeurs

5. Réparateurs de câbles électriques ou téléphoniques

6. Ingénieurs du génie civil

7. Bibliothécaires

8. Techniciens de la santé

9. Professeurs

Il n'existe pas vraiment de travail qui n'est pas stressant. Les personnes exerçant ces métiers cités comme les moins stressants ne sont sûrement pas du même avis. De même, l'ensemble des jobs nous donnent à un moment ou à un autre des raisons pour stresser.


La première chose à faire pour mieux gérer ce stress, est de savoir d'où il vient. Une bonne chose à faire est de noter les déclencheurs de notre stress. Voici quelques sources du stress au travail :

En second lieu, il faut se demander de quelle façon on peut éliminer ces déclencheurs ou au moins les limiter. On ne peut pas forcément éliminer les causes de notre stress ; dans ce cas, il faut faire un travail sur nous-mêmes.

Citations

«Le stress est l'état de l'organisme dont le bien-être est menacé et qui n'a pas de réponses immédiate pour diminuer cette menace», dans The stress of life' (Le stress de la vie) , Hans Selye, McGraw-Hill, 1977.

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. Echelle de Holmes et Rahe
  2. op. cit.
  3. Gianni M, Dentali F, Grandi AM et Als. Apical ballooning syndrome or takotsubo cardiomyopathy : a systematic review, Eur Heart J, 2006;27 :1523–1529
  4. Parkes CM, Benjamin B, Fitzgerald RG, Broken heart : a statistical study of increased mortality among widowers, BMJ, 1969;1 :740–743
  5. Steinberg JS, Arshad A, Kowalski M et als. Increased incidence of life-threatening ventricular arrhythmias in implantable defibrillator patients after the World Trade Center attack, J Am Coll Cardiol, 2004;44 :1261–1264
  6. Brotman DJ, Golden SH, Wittstein IS, The cardiovascular toll of stress, Lancet, 2007; 370 :1089-1100

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